Orwell, l'Interview!


Orwell est un groupe français de Pop indie mené par Jérôme Didelot, qui nous propose une pop soignée, luminescente et vaporeuse! On a donc souhaité en savoir plus... 


PM: Bonjour, Jérôme Didelot! Vous êtes à l’origine du groupe Orwell, que nous avons eu l’occasion de découvrir, il y a deux ans environ. Orwell, c’est doux, c’est frais, c’est aérien! Cela est-il dû à vos influences ? Racontez nous les débuts de cette aventure...

J.D: Le début de l’aventure remonte à la fin des années 90. J’avais alors passé quelques années dans un groupe d’étudiants nommé P.S. : Goodbye, avec lequel nous avons passé de bons moments, mais qui présentait les lacunes habituelles de ce genre de formation : manque de cohérence artistique, et parfois de sérieux ; aspirations disparates selon les membres. La création d’Orwell était pour moi l’occasion de mener un projet plus affûté, moins un groupe qu’une sorte d’atelier de chansons, épaulé par mes amis Thierry Bellia et Alexandre Longo, qui depuis ont créé leurs projets personnels, respectivement Variety Lab et Cascadeur (à ne pas confondre avec Cascada !). L’idée était de concilier notre héritage francophone avec notre goût pour la musique anglo-américaine.

PM: Orwell, c’est une histoire d’amitié également. Vous avez d’ailleurs collaboré avec Médéric Gontier des  Tahiti 80 sur votre premier album intitulé « Des lendemains » sorti en 2002. ou encore JP NATAF, l’ex leader du groupe Les Innocents sur le dernier, « Le génie humain ». Comment s’est passée la rencontre ?

J.D: En ce qui concerne JP Nataf, ça remonte à mon groupe précédent, qui avait un peu tourné en première partie des Innocents. Je l’ai toujours beaucoup admiré, et considéré comme un modèle pour sa démarche à la fois rigoureuse et décontractée. Il est exigeant sur le plan artistique, mais vit la musique avec une sorte de désinvolture attachante, surtout pour quelqu’un qui a connu le succès avec les Innocents. J’ai rencontré Médéric un peu plus tard, alors que nous avions invité Tahiti 80 à venir faire un concert acoustique à Nancy, dans le cadre d’activités associatives. Ce groupe fait plaisir à voir : quatre personnes qui jouent comme une seule, des petites perles pop aux mélodies particulièrement entêtantes. Je lui avais envoyé mes maquettes, c’est un super mec!


PM: Parlons du « Génie Humain », cet excellent opus, sorti en 2007. On y retrouve de morceaux magnifiquement bien ficelés, avec des arrangements soignés. On sent que vous avez réellement eu le souci du détail…

J.D: Le fait de travailler dans l’indépendance a le mérite de permettre de s’affranchir de circonstances dont j’imagine qu’elles existent pour les artistes à l’intérieur du système : délais à respecter, exigences de production à satisfaire… Je passe le temps qui me semble nécessaire à écrire et arranger, mais avant tout à réunir une douzaine de chansons qui valent la peine d’être enregistrées.
 
PM: On peut même retrouver quelques envolées lyriques notamment au travers du titre « Au-dessus de moi », avec des mélodies orchestrales…

J.D: Ce qu’on a coutume d’appeler la « pop orchestrale » est quelque chose qui m’a fait fantasmer pendant longtemps. Le fait d’être un musicien autodidacte m’a frustré durant de longues années, et un jour je me suis rendu compte que j’étais capable d’écrire, de façon plus instinctive qu’académique, des arrangements pour cordes, cuivres ou instruments à vent. Cette habitude de l’arrangement « en grande pompe » fait partie du son d’Orwell, même si je vais essayer de bouleverser un peu mes habitudes pour le prochain album.

PM: De plus en plus d’artistes français chantent de la pop en anglais, et prétendent que c’est la langue naturelle qui va avec le genre. Pourtant avec ce titre, chanté en français, vous avez relevé un challenge conséquent, à savoir réalisé du French/Brit’/Pop brillamment réussi ! Quel est votre opinion sur le sujet ?

J.D: J’ai l’impression qu’il faut fournir plus de travail pour essayer de faire sonner un titre de ce genre en français, et qu’au final les gens restent mal à l’aise avec la pop chantée dans la langue de Molière. Je ressens une certaine inhibition du public averti, qui a du mal à se détacher de la référence inévitable à la « variété » (Oh le vilain mot !). Quant aux gens moins spécialisés, il me semble que ça ne les touche pas vraiment car le texte est au deuxième plan, ce qui ne veut pas dire qu’il est accessoire.

PM: D’ailleurs lorsque l’on écoute le titre « Sun Holiday », on pense clairement aux Beatles, avez-vous baigné dans cette ambiance Lennon/Mc Cartney, plus jeune ?

J.D: Pas spécialement. J’aimais les Beatles comme on aime la nourriture de sa maman : on ne se demande même pas si c’est bon tellement c’est incontournable. La subtilité de leur musique ne m’est apparue que plus tard, lorsque j’ai commencé à écrire des chansons sérieusement.  A l’adolescence, j’ai plutôt écouté des groupes influencés par les Beatles, comme XTC ou New Musik. Je rends d’ailleurs hommage à certains des groupes que j’écoutais à cette époque sur le mini album « 80’s are 30 », à télécharger gratuitement sur notre site. (ici!)


PM: Vos albums sont sortis en Amérique du Nord, en Thaïlande, et au Japon, où vous avez rencontré un certain succès avec des tournées également, alors qu’en France, il n y a pas encore de réelles reconnaissances avec le public Français. Un peu comme les Tahiti 80 d’ailleurs, qu’en pensez vous ?

J.D: C’est très gentil de présenter les choses de cette façon, mais clairement Tahiti 80 et Orwell n’évoluent pas dans la même division. Les premiers sont de véritables stars au Japon, ont un honorable succès dans nombre d’autres pays et font partie d’une machinerie qui leur permet d’exister en tant que petite entreprise. Si nous avons eu la chance de voir nos disques sortir dans des pays aussi exotiques que la Thaïlande, le Japon et les Etats-Unis, et parfois d’y jouer, on ne peut pas prétendre que nous y avons rencontré un vif succès. Un succès d’estime dans le meilleur des cas, auréolé de quelques bons articles de presse et de l’intérêt d’un public averti.


PM: D’où tirez-vous votre inspiration ? Lorsque l’on écoute certains de vos textes, on a l’impression que certains prennent une dimension spirituelle...

J.D: Alors c’est involontaire, ou plutôt incontrôlé. Je dirais que je brode des paroles, plus que je ne les écris, dans la mesure où en général je chantonne quelques phrases sur une mélodie, de façon presque aléatoire. Si ça paraît être une piste valable, alors j’étoffe et j’essaie de construire un sens autour de ces quelques mots. Je ne suis guère inspiré par le quotidien – je n’ai jamais réussi à écrire une chanson sur les plats surgelés, peut-être aurais-je plus de succès – et j’ai tendance à imaginer des situations qui me semblent appuyer l’émotion que m’inspire la musique.

PM: Orwell est au final une fabuleuse histoire : d’amitiés, de voyages, d’affinités musicales…
Que peut-on vous souhaiter de bon, pour cette année 2010 qui démarre ?

J.D: C’est vrai que la musique m’apporte un certain équilibre, même si elle ne me fait pas vivre. Certes, je pourrais nourrir des regrets car, dans tout projet musical, il y a une part d’ambition à un moment donné et on ne peut pas affirmer qu’Orwell soit au firmament de la scène musicale française. Mais je sais me contenter de choses plus honorifiques que glorieuses, comme un mail de félicitations de l’écrivain Jonathan Coe à propos du dernier album, ou une belle chronique dans le magazine anglais Mojo. J’essaie de faire en sorte que 2010 soit l’année de la sortie d’un nouvel album. Alors souhaitez-moi d’avoir les moyens de le réaliser de la façon que je désire, en l’occurrence accompagné d’un livre de dessins signés par une jeune artiste norvégienne nommée Katrin Berge.